La perception de la schizophrénie chez les jeunes à Neuchâtel : résultats d’un questionnaire pilote sur la connaissance du trouble

Dans le cadre de mon stage en communication au CNP et des Journées de la Schizophrénie, je me suis interrogée sur la perception qu’ont les jeunes de cette maladie.

A l’occasion de ces journées, le CNP, l’association de familles et amis de personnes souffrant de schizophrénie (AFS), l’association neuchâteloise d’accueil et d’action psychiatrie (ANAAP) et le ceff SANTÉ-SOCIAL sont présent cette semaine dans des lycées afin de sensibiliser les jeunes et contrecarrer les stéréotypes associés à la schizophrénie. Faisant moi-même partie du public cible de cette action, mais évoluant dans un environnement de soin psychiatrique, j’ai voulu comprendre ce que des jeunes de mon âge, qui ne bénéficient pas du même accès à l’information, pensent de la schizophrénie. Pour cela, j’ai élaboré un questionnaire qui a été soumis à une classe de 15 jeunes en formation, âgé·e·s de 17 à 26 ans, afin de recueillir leurs idées reçues et leurs éventuelles craintes sur cette maladie.

Une partie des jeunes interrogés ont une connaissance partielle de la schizophrénie. La majorité l’associent aux hallucinations et à la paranoïa. Certain·e·s la définissent comme « une maladie qui nous fait voir et penser des choses qui ne sont pas réelles » ou encore comme « un problème mental ». Une participante a déclaré : « C’est une maladie mentale, sans médication et compliquée à gérer, et c’est le fait d’avoir constamment des voix et une plus grande sensibilité comparée à d’autres personnes qui rend la personne non comprise aux yeux des autres ». Les symptômes les plus cités par les participant·e·s incluent les hallucinations, la paranoïa et les changements de personnalité. Un adolescent a précisé : « La perception de voix ou d’hallucinations auditives ». Quant aux causes, les jeunes attribuent principalement l’apparition de la schizophrénie à des traumatismes psychologiques, des maladies neurologiques ou à la consommation de drogues.

Une majorité des jeunes interrogés ont découvert la schizophrénie à travers divers médias, principalement des films et des séries télévisées, tels que A Beautiful Mind, Shutter Island, Fight Club, Identity, Black Swan, Split ou Mr. Robot. Cependant, ces représentations sont souvent perçues comme exagérées et déformées. Comme l’a commenté une jeune, « J’ai l’impression que la schizophrénie au cinéma est souvent associée à une double personnalité violente et morbide. » La plupart des jeunes interrogé·e·s critiquent la manière dont les médias dépeignent la maladie, mettant en avant des aspects effrayants comme la violence et la folie, tout en négligeant une représentation plus nuancée. « C’est toujours le cliché d’entendre des voix, mais on ne parle pas vraiment de la complexité de la maladie », a résumé un participant.

La majorité des jeunes estime qu’avec un traitement et un suivi appropriés, une personne atteinte de schizophrénie peut mener une vie relativement normale. Une participante précise: « Sans médication, sa vie peut être extrêmement compliquée, mais avec un bon suivi, une bonne connaissance de soi et une médication adaptée, elle peut vivre normalement ». Concernant l’insertion professionnelle, les répondant·e·s considèrent généralement qu’une personne schizophrène peut travailler, tout en reconnaissant certaines limitations potentielles. « Oui, mais pas dans tous les emplois, certains nécessitent une stabilité psychologique et une bonne gestion du stress », explique un participant. Une autre souligne que « certaines entreprises sont plus souples ».

Sur le plan relationnel, les avis sont également nuancés. Plusieurs jeunes pensent qu’une personne atteinte de schizophrénie peut entretenir des relations sociales satisfaisantes, mais que cela dépend de la sévérité des symptômes et de l’environnement social. « Il faut se trouver un entourage qui accepte cette différence » a conseillé un répondant. Une autre a écrit : « Oui, il peut être très sympa et, au final, sa maladie ne changera pas forcément son comportement ». Les réactions à l’idée de vivre avec une personne schizophrène sont partagées. Certain·e·s jeunes expriment une certaine appréhension, citant la difficulté de comprendre la maladie et la peur de ne pas pouvoir communiquer efficacement. D’autres, en revanche, estiment qu’avec les bonnes connaissances et une prise de conscience, il est tout à fait possible de cohabiter sans problème.

Finalement, sur la base des résultats du questionnaire, on peut dire que certain·e·s jeunes s’intéressent à la santé mentale, tandis que d’autres y sont moins sensibles. Toutefois, la majorité affirment que si le sujet est présenté de manière attractive, ils seraient plus enclins à se renseigner. « N’importe quoi peut être intéressant si le contenu est bien présenté », a souligné un participant. Les répondants préfèrent les vidéos éducatives, les documentaires et les témoignages de personnes atteintes de schizophrénie. Une idée proposée consiste à analyser des personnages fictifs représentés de manière clichée et à distinguer les éléments scientifiquement corrects de ceux qui sont erronés. Une autre suggère d’organiser des interventions dans les écoles pour sensibiliser directement les jeunes. Ces initiatives visent à briser les tabous, à promouvoir une meilleure compréhension de la schizophrénie, et à encourager une réflexion ouverte et respectueuse sur cette maladie, dans un cadre bienveillant et accessible à tous.

En conclusion, cette enquête m’a permis de confronter mes propres idées reçues à une compréhension plus approfondie de la schizophrénie. Travailler dans un environnement lié à la psychiatrie me donne l’opportunité d’apprendre chaque jour, et je réalise à quel point l’information joue un rôle clé dans la perception des maladies mentales. Avant de me préparer pour les Journées de la Schizophrénie, mon avis rejoignait celui des jeunes interrogés. Mais en m’informant davantage, je découvre de plus en plus de choses qui élargissent ma compréhension de cette maladie. J’aimerais un jour pouvoir échanger avec une personne atteinte de schizophrénie, pour pouvoir poser des questions plus précise et encore mieux comprendre un trouble autant chargé dans sa représentation
d‘idées reçues et de généralisations pas toujours en phase avec les connaissances scientifiques et la réalité que vivent les personnes atteintes.

Pour aller plus loin : positiveminders.com

PositiveMinders est une association franco-suisse à but non lucratif, reconnue d’utilité publique depuis plus de 20 ans. Elle œuvre pour lever les barrières à l’accès aux soins précoces et inclusifs pour les maladies psychiques en luttant contre les clichés, en informant et en promouvant les bonnes pratiques, afin de faciliter le rétablissement des personnes en souffrance.

Articles récents

Maria Reis, employée de maison pendant 18 ans au CNP

Le 2 janvier 2007, Maria Reis se rend sur le site de Préfargier pour son premier jour en tant qu’employée de maison, sans rien connaître du milieu psychiatrique. Elle se souvient : « J’avais quelques appréhensions aux débuts, de changer de travail, d’entrer dans un milieu que je ne connaissais pas du tout… J’ai été témoin de moments difficiles, qui touchent, mais j’ai surtout vu que les patientes et patients sont des gens comme tout le monde, ils ont juste besoin de soin ». Avec son tempérament calme, sa gentillesse et son sens du détail, Maria se sent rapidement à l’aise au CNP et devient une collègue aussi appréciée qu’indispensable.

Lire plus